Vous venez d’écrire un superbe livre sur le Marquis de Sade, l’Amant des Lumières avec une iconographie exceptionnelle. Qu’est ce qui vous a amené vers le Marquis ?!
J’ai grandi à l’ombre du château du Marquis originaire de la région. C’est le château, ce vieux fortin qui domine le village et sa forme particulière qui m’ont avant tout séduit avant même le personnage de Sade et sa légende. Historien de formation, il m’est apparu aussi opportun de partir à la rencontre de cet homme méconnu que je croyais inaccessible…voué à l’enfer et opprimé par toute une société …le personnage m’est devenu familier très vite et intéressant car original et paradoxal.
A l’occasion du bicentenaire de sa mort évoquer Sade et se plonger dans son passé fut aussi pour moi une évidence.
Comment avez-vous réussi à trouver autant de documents iconographiques nouveaux et inédits ?
Tous mes livres publiés chez Assouline mettent en avant l’image. J’ai construit aussi mon commentaire à travers cette iconographie recherchée chez les descendants du Marquis.
Souvent inédits, les documents présentés dans ce livre sont le résultat de patientes recherches et je ne remercierai jamais assez la comtesse de Sade, Pierre Leroy et Pierre Cardin pour m’avoir ouvert si spontanément et de façon si désintéressée leurs archives.
Ayant une résidence à côté de Lacoste, j’ai chiné aussi durant des mois chez les antiquaires des souvenirs du Divin Marquis avec parfois de belles découvertes !
Est-ce que ce travail en profondeur vous a fait découvrir un autre Marquis de Sade ?
J’ai voulu montrer dans ce livre un autre visage du Marquis plus proche de nous…et pas seulement libertin…
Homme fascinant, Sade qui était un provocateur, capable du pire…était aussi un homme qui pouvait être tendre et sensible.
Accablé, insulté…le récit de sa vie montre aussi qu’il pouvait être un homme séduisant à bien des égards…J’ai voulu oublier le côté sulfureux du personnage pour mieux comprendre l’Homme, le Marquis et ignorer Sade et son libertinage outrancier.
Pensez-vous que le Marquis soit toujours d’actualité ? Est-il encore un précurseur ?
Sade a été un précurseur car il fut un homme libre…Sa vie et sa philosophie nous apprennent qu’on est avant tout porté par sa propre nature et que chacun d’entre nous est un destin unique.
Le destin de Sade est intéressant car au-delà de ses excès et de toutes ses débauches, il évoque aussi pour moi, et c’est aussi ce qui le rend actuel, que par ses frasques et ses écrits, notre vie est peut-être biologiquement sadique… Et que vivre c’est souffrir et faire aussi souffrir l’autre !
Notre monde aujourd’hui lui donne malheureusement raison…non ?
Votre livre est très original dans la constellation de ceux consacrés à Sade. Quelle image souhaitez-vous donner du divin Marquis ?
L’image que je souhaiterais donner de Sade est celle d’un homme qui n’a jamais renoncé et que cet esprit libre dans ce corps enfermé a voulu démontrer que si la nature humaine contenait aussi la mort, la souffrance et la destruction, elle pouvait aussi être sensible à la beauté et à la lumière.
La morale de Sade est complexe mais il est peut-être nécessaire pour l’homme que notre nature en la poussant à ses extrémités nous permet ainsi de nous rentre compte que la vie est courte et qu’il faut savoir en profiter.
Sade derrière ce discours de liberté sexuelle veut peut-être nous rappeler ainsi que la nature a créé les hommes pour qu’ils s’amusent sur terre et qu’au final seul compte l’individu.
Sade, l’Amant des Lumières un livre de Jean-Pascal Hesse à découvrir de toute urgence aux éditions Assouline